Le Chagrin

par Françoise Godbille

Lionel Duroy n’a pas digéré son enfance. Il s’est fâché avec tous les membres de sa famille en publiant : Priez pour nous. Il a récidivé vingt ans plus tard, en 2010, avec cette autobiographie de 700 pages qui se lit (presque) d’une traite.
Dans la première partie, le narrateur décrypte parfaitement le milieu social dont sont issus ses parents, leur idéologie, leurs rêves. Avec un enfant chaque année, la famille croît sans cesse (onze bébés en tout) ; la mère ne rêvant que grande vie bourgeoise, incapable de s’adapter à la réalité, le père dans l’impossibilité d’assurer un niveau de vie luxueux, allant de mensonges en petites combines jusqu’à la déroute.
La deuxième partie est fascinante car elle présente un jeune adulte se construisant sous nos yeux : comment le narrateur a été amené à échanger les valeurs politiques de sa famille contre les siennes, acquises petit à petit, par la réflexion, l’expérience, les rencontres.
Cette autobiographie est bouleversante : elle touche notre vie, nous en apprend sur nous-mêmes et soulève bien des pistes de réflexions.
A cause de ce livre, pour la première fois de ma vie, j’ai écrit à un auteur. Je voulais lui crier que l’apaisement viendrait avec le pardon. Il ne m’a jamais répondu.